Le mot du président
« N° 9 Djihad ! »
Le mot claque, porteur de toutes les craintes et de tous les fantasmes. Quelle est la réalité de ce combat ? Est-ce un terme guerrier, belliqueux et représentant une forme de « choc des civilisations » avant l’heure, où tout ce qui n’est pas « nous », qui n’est pas avec nous, est « contre nous » ? Représente-t-il une volonté d’essence défensive permettant de protéger ce qui a été acquis ? Ou signifie-t-il enfin une détermination intérieure d’amélioration et de perfectionnement de soi-même, en une forme d’ascèse intérieure combattant mes propres mauvais démons ?
Nous avons tenté de préciser dans ce numéro les multiples significations et interprétations du terme et du concept sous-jacent, sans fard, de manière réaliste et sincère.
Usama Hasan nous montre de manière très argumentée comment « délivrer l’islam de l’islamisme », c’est-à-dire s’affranchir d’une vision totalisante (pour ne pas dire totalitaire) du fonctionnement d’une société pour intégrer la beauté du commun, la miséricorde, la paix, la justice et en définitive la gentillesse (qu’il place en tête des principes coraniques énoncés). À ce titre, la question est moins celle de la lutte contre le mal, que celle de la promotion du bien et de la paix, ce qui lui permet de conclure, surprenant ainsi sans doute certains lecteurs, que « le djihad est fondamentalement un concept non violent »…
Reste que son interprétation dévoyée et belliqueuse doit être combattue (on se rappelle le « Guerre à la guerre », repris par Jaurès) et la compréhension de ses exaltés est essentielle. C’est ce que réalisent Hakim El Karoui et Benjamin Hodayé, avec leurs travaux sur les militants du Djihad français, leur sociologie, leur idéologie et leur parcours.
Et surtout regarder en face l’horreur, les traumatismes et l’extrême cruauté, malgré leur caractère proprement insupportable. La Professeure des Universités et psychanalyste Houria Abdelouahed témoigne ainsi du parcours des enfants-soldats de Daesh, devenant bourreaux après avoir été victimes.
Avec ces horreurs, nous sommes bien loin du combat intérieur que doit réaliser tout musulman en utilisant sa foi et sa raison (« Il faut comprendre pour croire ; et croire pour comprendre » disait Saint-Augustin), pour s’élever en spiritualité et réaliser son ijtihad, cet effort personnel de découverte, de réflexion et de recherche vers Dieu, qui est le véritable moteur de toute spiritualité.
Bonne lecture et merci de votre soutien réaffirmé.
Sadek Beloucif
Président de l’Association « L’Islam au XXIème siècle »
REVUE N°9 – Janvier-Mars 2023
Contribution : Eva Janadin, Usama Hasan, Benjamin Hodayé, Houria Abdelouahed.
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